Les conférences de Nantes-Histoire ont débuté pour leur 37e année avec les belles interventions de Georges Vigarello, de Sylvie Boulud-Gazo, et de notre première conférencière junior, Charlotte Briand. Plaisir de se retrouver, joie d’échanger, de connaître, de comprendre. Nous avons mis cette année notre cycle sous le signe de la Santé, et nous espérons que la petite allégorie que nous avons choisie pour illustrer nos flyers sera favorable à chacune et chacun, ainsi qu’au corps constitué que nous formons.
Mais, bien sûr, c’est au-delà de notre groupe qu’il faut réfléchir et regarder, regarder le monde en face, quand bien même on serait tenté de détourner les yeux devant les horreurs et les tragédies qu’offre l’actualité. Notre monde est-il malade ? Sur notre image, les mains tendues vers la Santé sont un geste d’imploration, presque de désespoir, mais cette prière s’adresse pourtant à la science que symbolise le caducée. L’histoire de la santé et de la médecine, les deux premières conférences nous l’ont montré, n’a rien d’un fleuve tranquille. Ignorances, préjugés, fausses croyances jalonnent la route et la progression n’a rien de linéaire. Mais, dans un effort toujours à poursuivre, la science avance dans la compréhension du fonctionnement du corps et de la vie. En s’appuyant sur ces connaissances, mais aussi sur la solidarité collective, on arrive à agir pour la santé, à soigner comme à prévenir, à éduquer, et les acquis de cette organisation collective doivent être préservés et si possible étendus et accessibles bien au-delà de notre pays.
L’histoire, science humaine, pourrait-elle, aussi, contribuer à soigner nos sociétés ? Elle aussi doit servir à dissiper préjugés, fausses croyances, illusions, pour faire le lien entre les individus et les groupes humains. Connaître et comprendre, établir et respecter les faits, démêler le vrai du faux, ou simplement le probable de l’improbable, rechercher la vérité pour elle-même, sans la tordre pour la rendre conforme à des intérêts, des passions, des croyances c’est l’honneur de l’historien. Faire de l’histoire c’est se décentrer, sortir de soi-même, faire la part des choses, contextualiser, utiliser face à tous les faits et toutes les causes les mêmes poids et mesures. Et c’est aussi enseigner. L’ancien professeur d’histoire-géographie signataire de ces lignes mesure le poids qui pèse aujourd’hui sur les épaules de ses collègues après l’assassinat qui vient de se produire trois ans après celui de Samuel Paty. Il sait aussi que les enseignants ne renoncent pas à leur mission de transmettre la connaissance, d’aider les jeunes à ouvrir les yeux, à comprendre le monde, et que bien souvent ils y réussissent.
A Nantes-Histoire, à notre niveau, dans des conditions plus faciles, nous participons à cette mission d’éducation populaire, et nous voyons, nous aussi, dans l’Histoire un remède à l’ignorance et à la haine.
Octobre 2023, Rémi Fabre.