Résumé

La France est au XIXe siècle le pays où le nombre de religieuses, rapporté à la population féminine, est le plus important. Cette terre d’élection d’un catholicisme au féminin qui voit se multiplier les apparitions mariales repose aussi sur un contrat social. « Bonnes sœurs » familières des rues des villes et des villages plus que contemplatives cloîtrées, ces femmes offrent à faible coût un personnel dévoué et suffisamment compétent pour contribuer à la scolarisation et à la demande de soins de la société française. En cette époque libérale, l’État s’engage peu et délègue la gestion de la question sociale à l’échelle communale et à des acteurs privés, notamment religieux. Cet édifice devait recevoir ses premières brèches avec l’arrivée au pouvoir des républicains en 1879, dans le domaine des écoles plus que de l’assistance, jusqu’à produire un grand exil des congrégations en Europe et dans le monde après les lois de 1901 et 1904. A travers de nombreux exemples et une riche iconographie, nous tâcherons aussi de suivre les parcours de vie de ces femmes qui ont trouvé dans les congrégations religieuses des espaces d’autonomie et d’initiative peu communs dans la société patriarcale du XIXe siècle français. Ce grand siècle forme l’apogée d’un modèle dont on cherchera cependant à interroger l’épaisseur historique entre XVIIe et XXe siècle.